L’Afrique, la convoitée ?
L’Afrique est en plein essor économique ! Une croissance économique estimée à une moyenne de 5 %. Même bien loin de l’apothéose et des performances miracles de l’économie asiatique de ces dernières années, c’est une prouesse mondialement reconnue. Du coup, « l’Afrique est un continent d’avenir », se plaisent à défendre les analystes. Un continent d’avenir qui suscite maintes convoitises.
Longtemps, c’est la France-Afrique qui cristallisait les attentions. Bien que décriée cette France-Afrique, aucun politique français n’aura finalement réussi à marquer la rupture avec cette tradition aussi « vieille » que le monde contemporain. François Hollande, grand défenseur « oral » de la fin de la France-Afrique l’a appris à ses dépens. Et le récent sommet de l’Elysée sur la paix et la sécurité en Afrique en est bien une illustration poignante. Au-delà des questions sécuritaires, il a été l’occasion pour la France, au détour d’un forum économique l’ayant précédé, de « quémander » une part considérable dans l’économie africaine. En effet, la France semble avoir perdu de grosses parts d’investissements sur le marché africain même dans ses anciennes colonies. Une situation, déjà trop catastrophique pour le pouvoir de Hollande, conscient que l’Afrique est le continent d’ « avenir ». Selon l’Elysée, le sommet aurait servi à élucider la question « comment travailler ensemble pour que la croissance du continent africain puisse être bénéfique à tous ? » Un modèle franco-africain de croissance qui contribuera à sortir les Africains de la misère et de la pauvreté, la France et plus largement l’Europe à juguler sa crise économique.
Et si Hollande s’évertue à remettre de la France au cœur de l’Afrique économique, la faute sans doute à ces nombreux pays qui, à chaque instant s’intéressent à l’Afrique.
La Chine, en tête de peloton serait le maître d’ouvrage du renouveau africain. Avec un modèle de coopération ultra économique avec l’Afrique, la Chine s’impose dans toutes les sphères de l’économie africaine. Des échanges commerciaux estimés à plus 180 milliards de dollars en 2012, la construction et le don du siège de l’Union africaine à Addis-Abeba à plus de 200 millions de dollars, la construction de routes, d’écoles, d’hôpitaux, des stades, des raffineries de sucre, et une part importante dans le pétrole du continent, la Chine va au-delà d’une simple convoitise de l’Afrique. Et le dernier forum sino-africain de coopération a été une nouvelle occasion pour les dirigeants de l’empire du Milieu de donner la preuve de leur profond « amour » pour l’Afrique.
L’Afrique de demain, ils sont bien nombreux de pays à participer à son édification. Chacun y va de sa stratégie et de son modèle de coopération. Les émirs pétroliers du golfe Arabo-Persique, usent d’une stratégie de bienfaisance et d’assistance humanitaire, qui fait déjà son effet. Le Fonds koweïtien d’investissement, la Banque islamique d’investissement et de commerce, la Fondation du Qatar, et dans une moindre mesure la Turquie réussissent tant bien que mal à s’imposer dans nombre de secteurs porteurs pour l’économie africaine dont notamment l’agriculture et le pétrole.
Au nom de la coopération Sud-Sud, l’Inde, le Brésil et même l’Afrique du Sud veulent sortir de l’ombre de grandes puissances économiques sur le continent. S’il existe un modèle de coopération Inde-Afrique bien connu basé sur la migration massive des Indiens sur le continent pour des investissements d’affaires dans le secteur minier en Afrique du Sud, sylvicole, agricole et dans l’exportation des produits cosmétiques sur le reste du continent, l’Afrique du Sud, le Brésil, la Russie et les autres repensent sans doute les leurs. Dans le magazine African Business en 2011, le premier ministre indien Manmohan Singh, déclarait lors d’un forum Afrique-Inde au siège de l’Union africaine « Ce sommet est une occasion pour les deux partenaires de renforcer leur coopération dans divers secteurs allant de l’agriculture à la télémédecine en passant par les infrastructures, la formation et le transfert des technologies, ainsi que la sécurité alimentaire et le partage des informations. » Aussi, insistera-t-il que « l’Inde et l’Afrique ont la particularité de disposer d’immenses ressources humaines et naturelles. Notre principe est de ne pas imposer nos valeurs aux pays africains ».
L’avenir du monde se joue-t-il autant en Afrique ?
Bien qu’il reste beaucoup à faire pour tenir ce rang du poumon de l’économie mondiale de demain, l’Afrique est sans équivoque le centre des grandes convoitises mondiales. Pour preuve, entre autres, la récente tournée du premier ministre japonais Shinzo Abe en Afrique et l’annonce faite par l’administration Obama d’organiser à la Maison Blanche en août prochain un sommet Etats-Unis/Afrique. Ce dernier sera précédé d’une rencontre avec les jeunes leaders du continent dans le cadre du Young African Leadership Programme (YALI). Le continent fait l’objet de convoitises autour de son fort potentiel en matières premières, le grand marché d’écoulement de produits manufacturés qu’il représente pour le futur, la jeunesse de sa population qui servira de main-d’œuvre « bon marché » pour les grosses firmes industrielles ancrées dans la délocalisation et la colocalisation.
Cet attrait que représente l’Afrique peut bien donner lieu à de conflits entre ces grandes puissances. La Chine a-t-elle vu d’un bon œil la visite sur le continent du premier ministre nippon Shizo Abe, qui comme une provocation s’est achevée en Ethiopie, un pays considéré comme la base arrière de la Chine sur le continent. Une chose est certaine, le Japon, « pays du soleil levant » veut se défaire de sa tunique d’éternel donateur pour muer en un véritable partenaire commercial de l’Afrique.
Et que dira la France de la nouvelle formule d’Obama ? Barak Obama, lui qui depuis sa prise de pouvoir en 2008 s’est montré peu regardant sur l’Afrique. Néanmoins, il ne faut pas oublier qu’il existe depuis des années des facilités d’échanges commerciaux que les Etats-Unis accordent à certains pays africains pour l’exportation sur le sol américain de certains produits.
De la convoitise extrême d’un continent, l’Afrique, à une guerre plus que géostratégique entre les grandes puissances, nous y sommes presque !
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