Police béninoise : quand zèle, fougue, communication tournent au ridicule…

17 décembre 2013

Police béninoise : quand zèle, fougue, communication tournent au ridicule…

Quelques agents de police du Bénin; Crédit: La Nouvelle Tribune
Quelques agents de police du Bénin; Crédit : La Nouvelle Tribune

Les Béninois font-ils encore confiance à leurs forces de sécurité publique ? La police béninoise mérite-elle encore les honneurs ? Ce sont là quelques interrogations qui hantent l’esprit d’un bon nombre de Béninois. Depuis un mauvais mariage, la police béninoise affiche zèle, fougue, et excès de communication.

Louis Philippe Houdégnon, le Directeur Général de la Police...
Louis Philippe Houdégnon, le directeur général de la police…

Connaissez-vous une police qui fait l’actualité ?  Une police super médiatisée, celle du Bénin en est une. Et la présence dans les médias des flics du Bénin est devenue chose courante depuis l’arrivée au pouvoir de Boni Yayi. En effet, l’accession au pouvoir de Boni Yayi en 2006 marque une série de recrutement de 1 000 agents de police par an dans la fonction publique. Pour l’homme, c’était sa manière à lui de créer des conditions sécuritaires plus stables qui puissent soutenir ce qu’il affichait comme de grandes ambitions de développement pour le pays. « Il ne peut avoir développement sans sécurité » arguait l’actuel locataire du palais de la Marina[1]. Cette hausse de l’effectif des fonctionnaires de la police a-t-elle permis de sortir le pays du gouffre de la criminalité ? Le Bénin est-il devenu un pays à délinquance zéro ?

 

Des agents de police sur le terrain... Crédit: 24 Heures au Bénin
Des agents de police sur le terrain… Crédit : 24 Heures au Bénin

Les différents ministres de l’Intérieur qui se sont succédé dans le gouvernement de Boni Yayi auront eu le mérite, chacun à sa façon d’inventer sa formule magique pour réprimer les hors-la-loi. Et la plus spectaculaire de ces actions d’éclat pour, dit-on mettre un terme à la délinquance au Bénin est sans doute l’ opération appelée « Djakpata ». Une opération censée sécuriser tout le pays avec une armada de policiers super outillés et des moyens suffisants. C’est du moins ce que prédisait l’ancien ministre de l’Intérieur Benoît Assouan Dègla, devenu conseiller spécial à la sécurité du chef de l’Etat après son débarquement du gouvernement. Mais en attendant qu’un bilan ne soit fait sur cette opération, les braquages n’ont pas encore déserté le pays.

Du nord au sud, les populations continuent d’ être victimes de ces hors-la- loi qui ne manquent point de ruse et de stratégie pour se défaire du dispositif policier. Néanmoins, l’opération Djakpata aura eu le mérite de faire déjouer dans quelques villes du pays des plans d’attaques criminelles, de braquages ou de vols. Chapeau Monsieur le Ministre. Vous n’aviez pas manqué l’occasion de prouver aux Béninois que vous aviez grandi dans les quartiers chauds de Yopougon en Côte d’Ivoire.

Au Bénin, on connaît la police pour « le rançonnement » des usagers de la route. Au pays, il n’est pas exigé d’avoir ses pièces en règle pour circuler, quelques jetons de banque suffisent pour arracher le silence des flics. Pas de besoin d’être un sage devant les feux tricolores, l’agent de police ne vous demandera pas mieux qu’un billet de banque pour faire de vous un champion de la violation du Code de la route.

Si la police béninoise se fait plus présente dans l’opinion nationale, c’est sans doute pour ses enquêtes à la va-vite. Dans plus d’une affaire, la police a beaucoup trop parlé, un peu trop vite même. Sur des dossiers délicats, elle a vite fait d’inculper, un peu trop condamner. Une police qui aura même marqué la rupture avec le silence. Ici, nous avions une police ou du moins de super flics, qui savent tous. Eux n’ont pas besoin d’enquête pour connaître les coupables, les agresseurs ou encore les commanditaires dans telle ou telle autre affaire. Ce sont de flics super formés qui ne respirent qu’un air policier. Eux sont des accrocs des micros, des caméras… Une médiatisation à outrance qui transcende même avec les principes élémentaires de l’enquête policière.

Dans ce méli-mélo d’une police béninoise sous les feux de la rampe, il y a un homme qui ravit la vedette. Surnommé le Jack Bauer[2], cet officier de policier surclassé au lendemain de son show médiatique dans l’affaire de tentative d’empoisonnement du chef de l’Etat, directeur de la police nationale peut à lui tout seul remonter toute une filière criminelle, démonter une bande organisée de malfaiteurs. Il en a le pouvoir. Et il le prouve si bien. Quelques secondes suffisent à ce numéro 1 de la police béninoise pour boucler une enquête policière. Après trente minutes, il peut identifier vos agresseurs. Une hyper puissance qui finit par révéler des dessous aux odeurs puantes. En effet, les récentes missions commandos dans lesquelles le disciple de Gérard De Villiers a embarqué ses hommes se sont vite révélées comme du pipeau.  Ces enquêtes avec ses hommes de main ne les ont conduits qu’à de cinglants désaveux des autorités judiciaires qu’elles soient béninoises ou françaises.

Dans l’affaire Patrice Talon plus connue sous l’appellation de « tentative d’empoisonnement du chef de l’Etat », les Béninois ont encore en mémoire l’enthousiasme avec lequel le super flic a présenté  à la presse sa prise. Dans son escarcelle, un ancien ministre, le médecin personnel du chef de l’Etat, sa gouvernante qui n’est rien d’autre que sa nièce, quelques éléments de la Garde républicaine, et une cargaison de produits « radioactifs ». On connaît la suite…

Et revoilà le flic qui suscite une grosse polémique à Cotonou et à l’intérieur du pays et qui occupe le devant de la scène. Suite à l’agression du très populaire défenseur des droits de l’homme Martin Assogba, l’homme solide comme un roc affirmait quelques minutes après détenir une piste, la bonne s’est-il exclamé. Quelques jours plus tard, le Jack Bauer national aurait démantelé la bande de barbares qui en voulaient à la vie du citoyen Assogba. Sept d’entre eux sont pris dans l’étau de la police. Une folle campagne de communication est enclenchée pour célébrer la prouesse d’une police et de son chef. » Mais patatras, la justice béninoise vient de bouder la police. Sans tambour ni trompette, bien que les médias et les réseaux sociaux n’ont pas manqué d’en faire leur chou gras, les sept présumés « coupables » ou « innocents » sont libérés pour défaut de preuve par le parquet général. Une humiliation pour la police ? La Nième ?

Seuls les Béninois qui vivent dans le secret des dieux de la police et/ou de la justice peuvent y répondre. Mais cette déculottée de la police nationale est pour l’opinion nationale celle de trop. Et elle ne manque pas de soulever des vagues d’interrogations sur le professionnalisme et le sérieux autant des simples agents que dans le cercle très fermé des barons de la police béninoise…

Affaire à suivre…


[2] Héros de la série 24 heures Chronos


Partagez

Commentaires

otibou
Répondre

en voilà un ki ma foi ma l'air bien zèlé.l'image est parlante.