Si j’étais magistrat ! 24 H dans les couloirs d’un tribunal

25 octobre 2013

Si j’étais magistrat ! 24 H dans les couloirs d’un tribunal

La façade principale du palais de justice de cotonou
La façade principale du palais de justice de Cotonou.

Ce n’est pas la première fois de ma vie que j’entrais dans un palais de justice. Ce n’est non plus la toute première fois de ma vie que j’y demandais un service. Mais ma journée du 24 octobre au tribunal de Cotonou ne m’a pas laissé indifférent. Drôle de coïncidence ! En ce 24e jour du 10e mois, j’ai passé 10 heures dans les couloirs du plus grand tribunal du Bénin. Et il a juste fallu ces quelques petites heures pour réaliser autrement la complexité de la mission du juge. Même si je n’ai pas eu gain de cause (mon casier judiciaire ne m’a pu être délivré), mon billet s’enchante de rendre hommage à ses hommes en boubou bleu.

Assis dans les escaliers qui mènent au cabinet d’instruction, j’ai tout vu et presque tout entendu. Combien ont-ils été ces mis en cause dans une affaire ou une autre à transiter en moins de 10 heures de temps devant mes petits yeux d’observateur. Une centaine ! Peut-être plus car, je me lassais de compter. J’étais accablé de réaliser que dans ce lot de « présumés coupables », se retrouvaient vieux, femmes, hommes, enfants, handicapés mêmes des personnes publiquement connues aux quatre coins du pays. Et ma désolation atteint son paroxysme quand je vis trois jeunes petits garçons sous escorte policière conduits au cabinet du juge des mineurs. Quel âge avaient-ils ? 5, 10, 15, pas 18 ans tout de même ? A cet instant précis, tout se met à bouger dans ma cervelle. Des milliers de questions traversent mon esprit ? Mais de toutes ces énigmes, une m’a laissé sur le carreau. A elle seule, elle a réchauffé maintes fois mon esprit.

« Si j’étais magistrat ? »

Jamais je ne me suis posé une question pareille. Jamais, car ma formation de base au secondaire m’avait très tôt mis sur un autre chemin. Jamais, car on a vite fait dans mon Bénin de peindre en noir les magistrats comme des corrompus et même des mafieux. Mais, aujourd’hui où je me pose la question de savoir « Si j’étais magistrat ? », permettez-moi de mettre en doute, certainement sans preuve, toutes ses allégations sur la profession de magistrat dans mon pays. Oui, je n’ai passé que 10 petites heures dans un tribunal, sans même assister à la moindre audience, mais mes regards m’ont fait croiser des hommes de cœur, surplombés par de nombreux dossiers, même les plus anodins. J’ai rencontré des hommes dont la cervelle est sans repos, des hommes qui doivent à chaque seconde près concilier leur humeur aux exigences du métier. J’ai les entendus au téléphone dans les couloirs du tribunal s’apitoyer sur le sort de certains mis en cause. J’ai même eu la chance de ma vie de suivre un magistrat sorti deux fois de la salle d’audience pour la lire la Bible dans les escaliers. Je n’avais encore rien vu. Car le comble sera à 18 h30 quand je croisai une magistrate presque en larmes. Je décidai de pousser ma curiosité pour comprendre ce qui se passe dans sa tête, elle, un haut fonctionnaire de la République pour perdre presque en public son mental. Je réalisai que c’est son côté maternel qui parla au fond d’elle, car trois petits garçons venaient d’être à trois ans de prison pour acte de vandalisme, séquestration et tentative de viol.  Oh mon Dieu ! Quel métier ? M’exclamai-je. Mais dans  ce métier, le cœur n’aurait jamais raison. Et même si au bout du rouleau, mon supplice « si j’étais magistrat » continue par hanter mon âme, je m’empresse de rendre hommage à ces hommes du droit et à tous ces jeunes étudiants des facultés de droit qui sans doute pour la plupart, ignorent encore l’embarras du métier qui serait le leur.

Et vous « si vous étiez magistrat ? »

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Commentaires

Léo
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Je vois juste à travers ton article que c'est bien compliqué le métier de magistrat. Moi non plus, je n'ai de réponse à ta question...

Ulfi
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Belle expérience et les hommages des hommes de toge sont merités. L'UNIVERS JUDICIAIRE ET PLEIN DE MYSTERES.

naoumane
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Dommage qu'on a du mal à porter une réponse. Cependant avec des hypothèses tout s'avère possible.