Gouvernance au Bénin : Yayi et sa bande d’amateurs
C’est la grosse actualité du jour au Bénin. Le chef de l’Etat est en passe de mettre fin à la crise qui secoue le pays depuis un peu plus de huit semaines. Au détour d’une rencontre au palais présidentiel avec les responsables syndicaux, Boni Yayi s’est montré en seul messie du pays.
Et ceci aucun membre de son gouvernement ne le conteste. Du moins ceux qui se sont prononcés sur les médias dont notamment le ministre du Travail et du dialogue social, qui sur Radio France Internationale (RFI) a affirmé que si les centrales syndicales arrivaient à mettre un terme à la grève après les différentes assemblées syndicales prévues en cette fin de semaine, cela aboutirait tout simplement à une victoire du président de la République. Même son de cloche de la part du ministre d’Etat chargé de l’Enseignement supérieur sur les ondes de la radio nationale. En clair les syndicalistes n’auraient pas réussi à faire plier le gouvernement comme ces derniers ont « tenté » de le faire croire à l’opinion publique en exhibant quelques avancées notables obtenues lors de la rencontre avec Boni Yayi.
La fin de la fronde sociale, c’est bien ce qui est espéré depuis des lustres du commun des Béninois. Mais dans ce cas d’espèce, elle relance bien la polémique autour de l’ « amateurisme » voire de l’ « incapacité » dans la gouvernance de certains collaborateurs de Boni Yayi.
Pourquoi avoir attendu Boni Yayi pour espérer la fin de la contestation sociale ? « C’est lui le président de la République » s’exclame-t-on.
Mais sous un autre angle, c’est tout simplement un aveu d’impuissance des proches collaborateurs de Boni Yayi. Et c’est bien ce qu’ont longtemps dénoncé certains Béninois qui n’hésitent toujours pas à peindre en noir la plupart des ministres qui ont été sous les ordres de Boni Yayi. Dans maintes de dossiers, il aura fallu faire recours à Boni Yayi.
Et c’est presque la seule formule de gouvernance dans les arcanes du pouvoir où seul Boni Yayi incarne le détenteur de la science infuse. Sans lui, même huit ministres face aux quatre leaders syndicaux n’ont jamais rien obtenu même pas un début de sortie de crise.
Boni Yayi, le super président se justifie aisément. Combien de parvenus autour de lui depuis son accession au pouvoir en 2006? Des gens très peu connus ou méconnus des Béninois, isolés dans la fonction publique ou à l’étranger, ont eu le privilège de leur vie d’être élevés pour les plus chanceux au rang de ministres, pour les autres bombardés à de hautes fonctions dans l’administration publique notamment les services stratégiques du pays et les moins chanceux greffés à des postes sortis de l’imaginaire de Yayi.
Des ministres, députés, directeurs d’entreprises publiques ou semi-publiques, cadres de l’administration sortis de nulle part jonchent l’équipe de gouvernance de Yayi. Et ils lui concèdent le droit absolu du Président tout puissant. Ce qui vaut toujours à l’homme un impressionnant culte de la personnalité dans les arcanes du pouvoir.
Au point même où ces titres et grades éminemment célèbres ont fini par être galvaudés dans le pays. Il y a désormais des universitaires qui refusent de se faire appeler « Docteur » pour s’extraire de la confusion.
Avec Boni Yayi, le béni-oui-ouisme a atteint son paroxysme. Et à chacune de ses sorties, ils sont bien nombreux ses collaborateurs qui se donnent en spectacle par crainte de recevoir la foudre d’un Chef de l’Etat toujours imprévisible.
Au gouvernement aucun membre n’oserait jamais penser le contraire de Boni Yayi. C’est la grande bassesse qui prime dans l’entourage d’un président qui incarnait le changement en 2006, puis la refondation en 2011.
Néanmoins, il y a eu des collaborateurs qui ont prouvé à Boni Yayi, parfois au prix de leur poste, que sans lui, ils pouvaient arriver à mieux gérer leurs affaires ministérielles ou leurs tâches . Mais sur cette liste, il y en a très peu même si Boni Yayi lui-même reconnaît le mérite de son actuelle ministre du Commerce Naomi Azaria. En l’espace de quelques mois, cette femme a géré deux crises majeures au sein de la Fédération béninoise de football et à la Chambre de Commerce et d’Industrie du Bénin. Ce qui lui vaut respect et admiration de nombre de Béninois.
Certains évoquent le cas des ministres Gaston Dossouhoui (ex-ministre de l’Agriculture et tout premier ministre limogé par Boni Yayi), Pascal Irénée Koupaki (son ancien premier ministre), Kessilé Tchalla (ancien ministre de la Santé), Roger Gbégnonvi (ex-ministre de l’Aalphabétisation) qui auraient fait les frais de leur courage et de leur non à l’amateurisme et à l’ultra présence de Yayi dans leur gestion ministérielle.